18
décembre, jour de repos....
Bamako,
capitale du Mali, fêtant cette année son état d'indépendance qui
date depuis un demi siècle.
Bamako,
ville qui grouille, ville qui par sa position géographique, située
dans une espèce de cuvette profonde, particulièrement illuminée,
est une ville chaude et polluée par l'émanation des moteurs
bruyants de milliers de petites motos, la Chine y a craché son
savoir-faire et son savoir-vendre.
Bamako,
ville où nous rencontrons notre deuxième grand fleuve africain,
après le Sénégal, maintenant la place au Leading Figure, le Niger,
autre mastodonte large et majestueux, le Niger que nous allons longer
et pratiquer jusqu'à notre arrivée à Tombouctou...le Niger
sur lequel, Inch'Allah, nous allons naviguer, en pinasse, mercredi,
pour aller de Kourikolo à Ségou.
Bamako,
ville dans laquelle Skubi et moi-même, nous nous sommes réfugiés
dans le Grand Hôtel, un hôtel digne du nom hôtel, hôtel dont nous
avions un peu besoin pour retomber sur un zeste de plus de confort,
vu le confort que nous avons connu les semaines précédentes,...
pour se refaire « une santé », ah...pauvres Toubabs,
pauvres adeptes au luxe éphémère mais tellement bienvenu, comme
des lâches, nous avons cédés à la tentation, mea maxima culpa,
mais quel délice...
Bamako,
ville dans laquelle j'espérais trouver à racheter un appareil photo
puisque mon Lumix avait succombé suite à une chute mémorable sur
La Piste...Pensez-vous...en cherchant dans le quartier derrière la
Cathédrale je suis tombé sur Sissiko qui m'a promis, d'ici lundi,
de réparer mon appareil malade... »Présentement, il faut
l'ouvrir pour savoir si après il voudra s'ouvrir! »...le
coquin!... » Après il faut voir si l'écran n'est pas trop
secoué, sinon, on va le changer! »...Pour tester la batterie,
sans aucune hésitation, il la fait toucher sa langue... «
Elle est bonne » il dit... » Mais il faut me donner un
acompte de 10000FCFA...sans blague (15 €) quand même!...Afrique
créative, Afrique étonnante...sur son établi figure un minimum de
matériel, petit poste à soudure, tournevis, quelques ustensiles
inconnus et une panoplie de téléphones portables et d'autres
appareils photo numérique complètement décarcassés, le contenu
d'une poubelle européenne, quoi...Inch'Allah.
Toujours
Bamako
En
arrivant au Parc Zoologique, situé juste à côté du Musée
National, le gardien de deux-roues me demandait 50 FCFA.
Je
lui donnais un billet de 2000 et il me disait de payer après la
visite, faute de monnaie.
A
l'entrée du parc, il était déjà 13H passées et il faisait déjà
bien chaud à l'ombre, la vendeuse de sachets d'eau me demandait 50
FCFA pour un sachet, je lui tendais mon billet de 2000 et elle
faisait non de la tête, j'avais pourtant bougrement soif.
Le
billet d'entrée, valeur 50 FCFA, m'a été accordé pour du vent en
méprisant d'un air fatigué mon billet de 2000 FCFA.
La
trompe du petit éléphanteau, se faufilant à travers le grillage
percé et déjà d'une autre époque, était sèche et dégageait une
sensation de peau humaine au toucher. Interdiction de lui donner à
manger, c'était écrit, c'était écrit aussi de mettre les
immondices telles sachets plastics, sachets papiers, bouteilles de
soda vides etc dans les containers prévus, pourtant pendant toute la
visite on marchait sur des ordures parsemées partout.
Une
dizaine de petits singes, des capucins de toute espèce, se
promenaient « en liberté » harnachés autour du ventre
par une lanière de bric et de broc et attachés au mur.
Une
outarde était logée à côté d'un couple de paons, figée comme
une statue grecque.
Un
chimpanzé tout seul, manifestement un mâle, à l'exigence de son
mâton-gardien, faisait des pas de danse dans le but d'obtenir
quelques arachides de son public plié de rire, il y en a qui n'en
pouvaient plus, pathétique et obscène.
Le
lion, imperturbable sur son plateau d'exposition, lacéré
d'esquarres, soumis et amaigrit par la solitude et l'ennui, avec ses
yeux cassés, fixait un point dans l'air tremblant de chaleur,
serait-il encore capable d'espérer? Son gardien se trouvait de
l'autre côté des barreaux mais me semblait autant perdu que le roi
de la savane, ils dormaient tous les deux, l'un les yeux ouverts,
l'autre dormait pour de vrai.
L'autruche
était en lutte et le faisait savoir, malgré l'heure fatidique de
l'ouverture des portes de l'enfer calorique elle n'arrêtait pas de
gesticuler ses membres inférieurs, haletant mais décidée d'en
finir avec sa poussée d' hormones.
En
quittant le parc quelques très jeunes noirs me lançaient « hé,
blanc, Toubab » et je me sentais un peu faire partie de ce Zoo.
Le
gardien de deux-roues n'avait toujours la réponse à mon billet de
2000 FCFA et du coup la visite ne m'avait pas coûté très cher mais
elle m'avait beaucoup appris sur le bien-être des animaux à Bamako,
sauvages ou pas.
21
décembre
Vers
les 14h30, à vélo, je retourne chercher nos deux passeports à
l'immigration malienne.
C'est
loin de l'hôtel Le Rabelais, où nous résidons maintenant, plus de
10km, mais je commence à connaître mon chemin dans cette mégapole
poussiéreuse et polluée.
Je
fais le tour de la ville par les deux ponts en restant de ce côté-ci
du fleuve, ça marche bien et j'y suis en 30 min, asphyxié par les
émanations de gaz.
Hier
soir notre interlocutrice ne voulait plus de nous, manifestement
fatiguée elle nous disait « Présentement, je vais aller à la
maison», fallait mieux ne rien tenter, ne rien dire, elle avait fait
ses heures de la journée et basta. Ce matin à 7H45, quand je suis
allé porter nos deux passeports, elle devenait d'un coup bavarde
quand elle comprenait que j'étais de nationalité belge?? J'ai vite
compris la raison «J'y suis allée le mois d'octobre, en Belgique, à
Oostende, avec toutes ces maisons le long de la plage» et, très
fière, elle ajoute « Mon fils y travaille, il conduit une
camionnette de transport et mon mari travaille à Paris »,
Putain, quelle vie de famille...Elle n'arrêtait pas de parler de
Oostende, des flamands, des wallons, du vent, du froid, des vieux qui
habitent Oostende, pas de jeunes, « Oui, mais la prochaine fois il
faudrait y aller le mois de juillet ou août! Pendant ces mois-là il
y a beaucoup de monde, surtout des jeunes» Je savais ce qu'elle
allait me répondre « Inch'Allah».
Le
voyage à vélo chargé à travers la partie « Centre
Commercial », ce matin quand nous avons changé d'hôtel, en
partant de la gare ferroviaire, où arrivent à dose homéopathique
des trains, par la Place de la Liberté, où, à cause de multiples
feux rouges, il est obligatoire de porter un masque, de préférence
un vrai masque à gaz si on ne veut pas mourir suffoqué sur le
champ, par la route de Sotuba, où, plus loin, on espère trouver Le
Rabelais, est une expérience assez unique, dantesque et
inoubliable...Une fois sur la route de Sotuba on passe devant la
Grande Poste, plus loin devant le Centre Artisanal, et encore plus
loin devant la Grande Mosquée...la route n'est pas toujours très
bonne, le goudron est souvent rare et du sable aime bien s'accumuler,
il faut être vigilant et bien tenir le guidon...ça klaxonne sans
arrêt, dans le dos,du côté droit, du côté gauche, les petites
motos se touchent presque et te dépassent à quelques centimètres
près, les « ville-brousses » racolent les clients en
changeant de direction constamment, des piétons qui se baladent dans
tous les sens, surtout en contre-sens, comme d'innombrables chariots
remplis de légumes ou d'autres produits divers, poussés par des
mecs d'un air absent et amorphe, attention, la Mercedes veut se garer
de l'autre côté de la route, personne s'énerve ni rouspète, il
fait trop chaud....Chaque mouvement de tête, chaque clignement de
l'œil apporte une vision différente sur cette fourmilière, le
cerveau n'arrive pas à suivre, il se fatigue, il a soif comme le
reste de l'organisme, la chaleur est palpable...pas s'arrêter pour
faire des photos, vaut mieux savourer, subir, être heureux de se
trouver ici, de passage, et non pas pour y vivre tout le temps...